Ça s’en va et quand ça revient, on s’empresse de retourner sa veste. La preuve avec les ballerines qui, après vingt ans de sévère mise au rebut, repassent au rang des accessoires les plus aperçues aux pieds des filles pointues. Même revirement sur la cagoule, la jupe-culotte, le sous-pull, le pull de montagne et le logo apparent. Personne ne vous oblige à les faire entrer dans vos placards mais ça devient plus complexe de les traiter de vieilleries démodées. Je pense aussi à la catégorie des vêtements « moches, pas seyants, inélégants donc ringards » aux yeux des personnes moins sensibles à la mode : les mules (surtout portées avec des chaussettes), les sandales de randonnée, le jogging molletonné, le bob en éponge, les chaussettes blanches…

Mais en voilà qui, à mon avis, auront du mal à passer l’examen des pièces à réhabiliter :

Le faux jean

Bourré d’élasthanne et de polyester, étriqué jusqu’aux chevilles, ce skinny ne convient à aucune morphologie. Bardé de vilains détails, de taches de délavage artificielles et de surpiqûres grossières, il ne peut réjouir aucune penderie. À fuir absolument. 

Le cardigan mou

Il a été acheté pour réchauffer une fin d’après-midi difficile. Déjà neuf, sa couleur hésitait entre le beige lavabo et le blanc accident de lavage. Ou, dans une version plus extravertie, entre le orange criard et le rose barbie. Sa coupe ? Inexistante, difforme, informe… Sa matière ? De l’acrylique qui réussit à briller alors qu’on ne lui a rien demandé. Ouste ! 

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La chemise blanche étriquée

Comparée aux chemises amples et souples de ces dernières années, elle semble bien courte et étroite. Elle invoque son complice le slim taille basse des années 2000. Soit un duo incompatible avec les exigences actuelles de confort.

Le détail « tendance »

C’est celui qui se croit tellement fort qu’il a oublié que la coupe, la matière et les finitions sont la priorité d’une pièce qui vieillira bien. Ce tic mode d’une petite saison - slogan niais floqué sur un t-shirt, encolure bordée d’une dentelle synthétique, boutons dorés strassés et autres détails de mauvaise facture - signe son obsolescence programmée.

La micro socquette noir de sport

Elle n’a rien à faire dans des baskets de ville si ce n’est déstabiliser l’harmonie d’une tenue.

Les chaussures pointues

Pas l’élégant pointu d’un escarpin sixties mais l’ultra pointu d’une chaussure de lutin d’un siècle lointain. 

L’imprimé animalier stylisé

Il peut avoir de l’esprit. Sauf lorsqu’il est loupé. Et c’est fréquemment le cas ! Rien ne vaut la copie du vrai. Même sur un accessoire (écharpe, chaussettes, ceinture).

Les imprimés brouillon

Rayures déséquilibrées, fleurs ratées, carreaux à géométrie variable, dessins 3D mal maitrisés et autres motifs perturbés qui se veulent créatifs ne passeront pas en deuxième année. Les créateurs ont le doit de jouer avec la rayure marine ou la fleur d’origine à condition de maitriser l’audace. L’originalité pour l’originalité part souvent perdante.

Finalement, le ringard se niche essentiellement dans le cheap. Parce qu’un vêtement bien conçu, avec des volumes aux proportions justes et une étoffe à la hauteur aura toutes les chances de bien vieillir. Même si son style date, même si on passe son tour, on ne peut pas le considérer comme ringard. Jeannine, une lectrice, se souvient des années 2000 où elle détestait la déco 70's de la maison familiale. Depuis, son point de vue a radicalement changé. « J’ai justement aménagé mon appartement avec des pièces venant de chez mes parents que je trouvais ringardes, précise-t-elle. Nous vivons une époque de retour aux sources, d'upcycling, d'engouement pour la seconde main et le vintage. Je pense donc que le terme "ringard" n'a plus lieu d'être utilisé et c'est tant mieux ! »

Qu’en pense une pro du vintage dont la sensibilité est de repérer le retour des tendances ? « J’ai récemment chiné un ensemble trois pièces en stretch léopard années 80, bustier, mini jupe et corsaire que j’imagine avec des escarpins et chaussettes, commente Marine Chotard, fondatrice de la boutique vintage Misse Sugar Cane à Paris. Certaines clientes vont passer complètement à  côté et trouver ça ringard et vulgaire mais je sais qu’une fille va adorer ce côté starlette au Palace. Idem pour une veste en tweed d’homme oversize que certaines jugeront papy jusqu’au jour où une fille s'y lovera avec amour. J’adore les imprimés, notamment les fleurs des robes de grand-mère. Avec les bons accessoires, la robe de mamie est hyper fraîche. Ce qui est ringard est ce qui n’est pas assumé. Si ça l’est, un peu de désinvolture et de panache l’emporteront ! Rien ne m’amuse plus que de voir celle qui comprendra le scénario d’un vêtement et la façon de la mettre en scène. » On valide ! Parce que justement, c’est l’appropriation d’une pièce, aussi démodée soit-elle, qui permet de dépasser les préjugés. Le déguisement n’a jamais fait bon ménage avec l’allure. Alors à l’heure où le gaspillage vestimentaire est obsolète, les belles ringardises ont toutes leur chance !