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Ces vêtements qui intimident

L’atelier morpho-style de ce samedi m’a donné l’idée de ce thème. Avec le groupe de participantes, nous avons évoqué l’aspect intimidant de certains vêtements. Ces pièces qui restent dans le placard parce qu’elles sont trop belles, différentes, salissantes, neuves ou impressionnantes et qu’il faudrait garder pour les jours « vraiment super ».

Ce n’est pas forcément une question de prix.

Parfois, c’est tellement rare de tomber sur le vêtement ou les chaussures qui vous comblent que vous ne voulez pas prendre le risque de les user ou de les laver trop souvent.

Peur de l’accroc ou de la grosse tache. Mais pas seulement.

Dans les penderies que je revisite, je croise souvent le vêtement qui impressionne (ils peuvent être nombreux). On l’adore mais on n’ose pas le porter.

Au début, on regarde sa trouvaille avec joie. On profite de cette phase de préliminaires. Mais à force de ne pas consommer, on reste frustrée.

Si comme moi, quand vous étiez petite, vous n’aviez pas le droit de porter vos vêtements neufs tout de suite (il fallait d’abord user les vieux), vous avez peut-être gardé cette habitude. Ça fait longtemps que j’ai transgressé la règle. J’adopte très vite les petits nouveaux.

C’est un conseil que je donne à la fin d’une session shopping :
« Portez-vous vos achats sinon, le jour où vous déciderez de faire connaissance, vous serez trop intimidée. »

Quand la pièce est « trop » belle inhabituelle, certaines personnes se demandent si elles méritent une telle merveille.

Je comprends cette gêne de porter une pièce trop tendance ou voyante. Pas envie de prendre le risque d’entendre un « Tu vas où avec ton pantalon doré ? C’est carnaval ? ».  Ah ces piques malveillantes qui en disent tellement long sur ceux qui les prononcent (« ça les occupe », ai-je l’habitude de dire).

Je connais aussi des personnes qui n’osent pas porter la pièce sur laquelle elles ont fantasmé longtemps (en général, un sac, un bijou ou des chaussures qui coûtent un bras) : une fois la chose acquise, elles ont des scrupules à se montrer avec un accessoire qui vaut 1/3 de smic ou plus. D’autres répondraient qu’elles travaillent suffisamment dur et le méritent. Ou qu’un beau vêtement ou un joli sac valent toujours moins cher que des cheaperies qui vieillissent mal et qu’il faudra remplacer régulièrement.

Un jour, une jeune femme a évoqué sa peur de déborder. Comme si le fait de valider un vêtement un peu « fort » allait lui ouvrir la porte vers des extravagances incontrôlables.

Chacune avance à son rythme.

Bien sûr, on peut avoir envie de garder des vêtements ou des accessoires impeccables (pour les grands jours) mais je trouve dommage de se frustrer et de ne pas oser profiter au quotidien des pièces que l’on aime. Et de se contenter du tout-venant chez soi. Pourquoi se punir avec un t-shirt abimé ou un pantalon peu seyant ?

Et puis, ces affaires neuves risquent de se démoder sans qu’on s’en aperçoive.

Un jour, un événement nous fait réaliser le côté éphémère des choses, la vitesse du temps qui passe… Alors, on passe outre et on décide de s’amuser avec les cadeaux que l’on a pris soin de se faire.

Une penderie, c’est vivant ! C’est normal que ça vieillisse aussi.

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